C'est l'incertitude pour le marché de l'immobilier neuf : la hausse des taux d'intérêt, l'inflation et le flottement politique pèsent lourdement sur les décisions d'achat et d'investissement dans le secteur du neuf. Les chiffres sont révélateurs : baisse drastique des prêts immobiliers, difficultés accrues pour l'obtention de permis de construire et une diminution significative des mises en chantier.
Une baisse drastique des prêts immobiliers
En 2023, le marché immobilier français a été marqué par une chute spectaculaire du nombre de prêts immobiliers accordés, avec une baisse de 38 % par rapport à l'année précédente. Cette diminution s'explique en partie par la hausse des taux d'intérêt, qui atteignaient 3,85 % hors assurance sur 20 ans en mai 2024, soit une augmentation de 1,2 % en un an. Ces taux élevés, combinés à une inflation de +2,2 % au premier trimestre 2024, ont considérablement réduit le pouvoir d'achat des acheteurs. L'accès au crédit est devenu plus difficile, exacerbant les difficultés des ménages à financer l'achat de leur logement.
La fin du dispositif Pinel, qui offrait des avantages fiscaux pour l'investissement locatif dans le neuf, a également contribué à la morosité du marché. Les acheteurs potentiels, déjà confrontés à des difficultés d'obtention de crédit, voient leur pouvoir d'achat se détériorer. Selon les sondages, 49 % des porteurs de projets immobiliers s'attendent à une dégradation de leur pouvoir d'achat dans les six prochains mois. Cette proportion est plus élevée que celle observée chez les porteurs de projets dans l'immobilier ancien. La fin du Pinel supprime une incitation importante à l'investissement, augmentant l'incertitude pour les acheteurs et les investisseurs.
Les permis de construire marquent les difficultés du marché
Le marché du neuf est également confronté à des défis structurels. L'obtention des permis de construire est de plus en plus difficile et les coûts de construction continuent de grimper. Les autorisations de logements entre avril 2023 et mars 2024 ont chuté de 20 % en un an, atteignant 344 500 unités.
Certaines régions comme l'Île-de-France et la Bourgogne Franche-Comté enregistrent même des baisses respectives de 26 % et 23 %. Cette baisse des permis de construire limite l'offre de nouveaux logements et contribue à la stagnation ou à la hausse des prix.
Une nette baisse des réservations
Depuis 2019, les réservations de logements neufs sont en baisse continue. En 2022, 103 116 réservations ont été enregistrées, contre seulement 64 485 en 2023, soit une baisse de 37 %. Dans ce contexte tendu, les ventes en bloc – c'est-à-dire la vente de plusieurs logements à un même acheteur, souvent un investisseur institutionnel – prennent une importance croissante.
La part des ventes en bloc est passée de 21 % au premier trimestre 2023 à 32 % au premier trimestre 2024, illustrant la difficulté croissante des particuliers à accéder au marché du neuf.
30 % des porteurs de projet pensent que le prix va baisser dans le neuf, contre 49 % sur le marché de l’immobilier l’ancien.
L’inquiétude et l’attentisme des porteurs de projets
Les porteurs de projets sont de plus en plus inquiets quant à l'évolution de leur pouvoir d'achat immobilier. Alors que 49 % pensent que leur pouvoir d'achat va se dégrader, seuls 18 % s'attendent à une amélioration. Cette préoccupation est exacerbée par les prix élevés du neuf par rapport à l'ancien. En conséquence, 67 % des porteurs de projets envisagent de négocier les prix, une proportion néanmoins inférieure aux 92 % observés sur le marché de l'ancien.
Les investisseurs sont particulièrement affectés par les conditions actuelles. Leur nombre a diminué de 39 % entre le premier trimestre 2023 et le premier trimestre 2024, passant de 5 884 à 3 573. De même, le nombre de propriétaires a baissé de 20 % sur la même période. Cette réduction du nombre d'investisseurs et d'acheteurs potentiels a pour conséquence un marché attentiste, où seulement 38 % des personnes interrogées pensent que c'est le bon moment pour acheter un bien neuf, tandis que 32 % ne se prononcent pas.
Des disparités régionales marquées
Malgré ces difficultés, les prix du neuf ont enregistré des baisses dans plusieurs régions. Par exemple, à Montpellier, les prix ont chuté de 8 % en un an, atteignant 5 063 €/m². À Nantes, la baisse est de 7 % et à Rennes de 10 %. Cependant, certaines villes comme Strasbourg, Nice et Marseille ont vu leurs prix se stabiliser voire augmenter, avec une hausse notable de 13 % à Marseille.
Le nombre de programmes neufs a également évolué différemment selon les régions. Alors que certaines régions comme la Nouvelle-Aquitaine (-24 %), le Centre-Val de Loire (-19 %) et l'Occitanie (-15 %) voient une baisse significative du nombre de programmes, d'autres comme la Bretagne (+34 %), la Bourgogne Franche-Comté (+23 %) et la Normandie (+12 %) enregistrent une augmentation. Ces disparités régionales montrent que le marché du neuf est loin d'être uniforme, avec des dynamiques locales très variées.
La baisse des permis de construire et de mises en chantier
Les mises en chantier ont également diminué, avec seulement 60 800 unités enregistrées de janvier à mars 2024, soit une baisse de 20,1 % par rapport à l'année précédente. Les autorisations de logements ont également chuté à 81 800 autorisations de janvier à mars 2024, soit -12,8 % par rapport à l’année dernière. La baisse des autorisations de logements et des mises en chantier est un indicateur inquiétant de la santé du marché du neuf, reflétant les nombreux obstacles auxquels les promoteurs et les constructeurs sont confrontés. Les autorisations de logements ont connu des baisses particulièrement marquées dans certaines régions :
- -23 % en Bourgogne Franche-Comté
- -21 % en Auvergne Rhône Alpes
- -23 % en Centre-Val de Loire
- -20 % en Normandie
- -26 % en Île-de-France
- -18 % en Nouvelle-Aquitaine
- -17 % en Occitanie
Quant au nombre de programmes neufs, il a également reculé de 5 % au 2e trimestre 2024 par rapport au 2e trimestre 2023. Là encore, certaines régions ont été plus touchées que d’autres, comme en Nouvelle-Aquitaine (-24 %), en Centre-Val de Loire (-19 %), en Occitanie (15 %) ou en Île-de-France (-11 %). Dans certaines régions, le nombre de programmes neufs est en hausse comme en Bretagne (+34 %), en Bourgogne Franche-Comté (+23 %) ou en Normandie (+12 %).
La part des investisseurs dans le neuf est passée de 35 % au 1er trimestre 2023 à 29 % au 1er trimestre 2024.
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