Peut-on s’opposer à un projet de construction ?

Blandine Rochelle
mis à jour le
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La loi encadre les projets de construction. En effet, tous ces projets sont soumis à une autorisation. Cependant, quel que soit le programme immobilier, celui-ci ne doit pas porter atteinte aux intérêts du voisinage. Peut-on contester un projet de construction ? Quels sont les recours ?

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Toute personne qui intente un recours pour s’opposer à un permis de construire devra apporter les preuves que ce projet aura un impact direct sur ses propres conditions d’occupation. © JU.STOCKER - Shutterstock
Toute personne qui intente un recours pour s’opposer à un permis de construire devra apporter les preuves que ce projet aura un impact direct sur ses propres conditions d’occupation. © JU.STOCKER - Shutterstock
Sommaire

Sur quelle base peut-on s’opposer à un projet de construction ?

  • Le champ d’action des particuliers

Par principe, un permis de construire peut être contesté. En revanche, la personne agissant pour contester ce projet doit justifier d’un intérêt à agir. Cette règle a été durcie en 2013, afin d’éviter les recours abusifs de la part des personnes souhaitant obtenir une somme d’argent contre la promesse du retrait de leur plainte. Ainsi, désormais, toute personne qui intente un recours pour s’opposer à un permis de construire devra prouver que ce projet aura un impact sur ses propres conditions d’occupation. Pour qu’un particulier agisse légitimement contre un projet de construction, il doit tout d’abord résider à proximité du lieu où le permis de construire a été déposé. Mais il doit également prouver que ce projet porte atteinte à ses intérêts. Il peut s’agir d’une perte d’ensoleillement, de la perte d’une vue, de nuisances sonores, d’un aspect disgracieux de la future construction…). Concrètement, il faut que la construction, l’aménagement ou les travaux réalisés affectent directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien immobilier du particulier qui fait la réclamation. Ce dernier doit également être capable de démontrer en quoi l’occupation de son bien est susceptible d’être affectée par le projet immobilier. Pour cela, il doit constituer un dossier solide, comprenant des éléments concrets. L’aide d’un avocat spécialisé peut être utile à ce stade. Précisons que les locataires, comme les propriétaires, ont la possibilité de contester un projet immobilier qui leur portent préjudice. En cas de recours abusif, sachez que la loi a également prévu des sanctions : l’auteur d’un tel recours se verra infligé des dommages et intérêts.

Contester un permis de construire

Vous pouvez contester un permis de construire si vous justifiez d'un intérêt à agir.

  • Le champ d’action des associations

Certains particuliers décident de se regrouper en associations afin d’avoir plus de poids face à leur opposant. Il s’agit de les distinguer des particuliers dont les conditions de recours ne seront pas strictement les mêmes. Tout d’abord, sachez qu’une association ne pourra agir contre un projet de construction que si ses statuts ont été déposés auprès de la préfecture avant l’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire.

Par ailleurs, le tribunal appréciera l’intérêt à agir d’une association en fonction de son objet social et de sa situation géographique.

Dans un premier temps, l’objet social de l’association doit être urbanistique ou environnemental, et suffisamment précis. En effet, la contestation d’une association, dont l’objet social serait trop généraliste (défense des droits de l’homme et de son environnement, par exemple) ou éloigné du contexte, ne sera pas justifiée.

Enfin, le champ d’action d’une association n’est pas illimité. Généralement, le tribunal admet le recours d’une association locale dans un cadre communal, toutefois cela dépend également de l’ampleur du projet contesté. Il peut donc être admis qu’une association, dont le ressort est régional, puisse contester un projet de grande ampleur.

Bon à savoir

Depuis le 1er octobre 2013, il n’est plus possible de faire appel d’une décision rendue par le tribunal administratif dans nombre d’agglomérations de plus de 50 000 habitants. Le seul recours encore possible reste la saisine du Conseil d’Etat. 

Quels sont les recours possibles ?

En premier lieu, vous devez respecter un certain délai pour effectuer votre recours. En effet, vous ne disposez que de deux mois à compter du premier jour de l’affichage du permis de construire sur le terrain concerné. Il est important de préciser que la seule mise en place d’un panneau d’information n’est pas suffisante. Ce panneau doit être visible depuis la voie publique, l’affichage ne doit pas être interrompu pendant toute la durée du chantier. Ainsi, si le panneau d’affichage n’est pas visible, qu’il n’a été constaté par personne ou si l’affichage a été interrompu, la formalité de publicité n’est pas valide et il est donc possible de faire un recours au-delà du délai de deux mois. Beaucoup de personnes attendent que les travaux commencent pour contester la décision, or généralement, il est déjà trop tard. C’est pour cela qu’il est conseillé de se faire accompagner par un avocat spécialisé en droit de l’urbanisme ou en droit public peut accroître ses chances d’obtenir gain de cause.

Quelles démarches pour contester un chantier ?

En ce qui concerne les démarches, deux possibilités s’offrent à vous :

Vous pouvez former un recours gracieux qui se présente sous forme d’une lettre recommandée adressée au maire de la commune. Le recours gracieux est une démarche amiable permettant de saisir le maire qui a délivré l'autorisation pour lui demander d'annuler sa décision. Il suspend le délai de 2 mois pour faire un recours contentieux en justice. Le maire dispose de 2 mois pour annuler l'autorisation d'urbanisme ou rejeter votre demande. En cas de rejet de votre recours gracieux auprès de la mairie, vous pouvez saisir le tribunal dans les 2 mois suivant pour former un recours contentieux.

Vous pouvez également former directement un recours contentieux, sans passer par le recours gracieux, si vous estimez que le permis ne respecte pas les règles d'urbanisme. Vous devez alors saisir le juge administratif dans un délai de 2 mois à partir du 1er jour de l'affichage de l'autorisation sur le terrain, pour lui demander d'annuler l'autorisation d'urbanisme. Il n'est pas obligatoire de recourir à un avocat.

Sachez que le recours n’est pas suspensif. Cela signifie que même s’il en a tout intérêt, le propriétaire n’est pas dans l’obligation de suspendre les travaux. La plupart des propriétaires arrêtent la construction, mais s’ils ne le font pas et que vous souhaitez voir les travaux cesser, il vous sera alors possible de former un recours dit « en référé suspension », qui permettra, s’il vous est accordé, d’interrompre les travaux immédiatement sans attendre la décision finale du maire ou du tribunal. Cette requête distincte doit être réalisée en parallèle du recours en annulation effectué à l’encontre du permis de construire. Elle doit être motivée par une urgence suffisante et des motifs pouvant engendrer un sérieux doute sur la légalité du permis de construire. Suite à cette requête, le juge se prononcera dans les plus brefs délais.

Les locataires peuvent-ils contester un projet de construction ?

Sachez que toute personne ayant un intérêt à agir peut s’opposer à un projet de construction qui lui porte grief. Les locataires sont donc autant concernés que les propriétaires. Un locataire qui considère qu’un projet de construction va réduire son confort de vie et porter atteinte à ses intérêts peut donc déposer un recours en annulation d’un permis de construire. Il peut d’ailleurs le faire en son nom et sans solliciter le propriétaire bailleur : ce dernier n’a pas à autoriser ou empêcher le locataire d’intenter une action. Les recours et les démarches décrites ci-dessus sont donc identiques pour tout le monde, et le recours peut être administratif ou judiciaire.

Quid de la formation d’une association pour contester un permis de construire ?

Si vous êtes tenté par la formation d’une association pour peser plus lourd lors de la contestation d’un permis de construire, soyez vigilant. En effet, on peut penser que l’action collective sera peut-être plus convaincante, or la loi lutte contre la formation d’associations fictives, et cela peut donc devenir une faiblesse.

Il faut savoir que par le passé, de nombreuses associations se sont montées dans l’unique objectif de contester certains permis de construire, et leur recours peut être considéré comme abusif, ce qui peut entraîner des sanctions.

Depuis 2006, le champ d’action des associations est réduit, et ces associations ne peuvent pas contester tous les permis de construire. Pour pouvoir le faire, il leur faut respecter plusieurs conditions :

  • Les statuts constitutifs de l’association doivent être déposés en préfecture à la date d’affichage de l’autorisation et non à la date d’introduction du recours.
  • On doit pouvoir relever un lien suffisamment cohérent entre les intérêts défendus par l’association, au regard de ce qui est mentionné dans ses statuts, et la décision qu’elle souhaite contester.

Les points clés à retenir

  • Pour pouvoir vous opposer légalement à un permis de construire, vous devez justifier d’un intérêt à agir, encadré par la loi.
  • Les recours abusifs sont sanctionnés par le versement de dommages et intérêts.
  • Si vous souhaitez contester un projet de construction, vous disposez d’un délai de deux mois à partir du premier jour de l’affichage du permis de construire, et vous avez la possibilité de former un recours gracieux ou un recours contentieux.
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